Un couple avait acquis une maison d'habitation dans laquelle des travaux d'agrandissement avaient été réalisés. Or, le permis de construire initialement délivré faisait état d'un bien comportant seulement 4 pièces principales, sans qu'a priori un permis modificatif – ou a fortiori un nouveau – ait pu être produit par le vendeur s'agissant des trois pièces supplémentaires créées par la suite. Conscient de ce qu'il s'agissait là certainement de travaux illégaux, le notaire chargé d'instrumenter l'acte authentique de vente avait alors pris la précaution de faire déclarer aux acquéreurs qu'ils ne faisaient pas « de la possibilité d'exécuter des travaux nécessitant l'obtention préalable d'un permis de construire une condition de la réalisation de la vente ». De plus, il avait pu être établi que l'édification litigieuse avait été réalisée plus de 10 ans auparavant, ce qui mettait lesdits acquéreurs à l'abri au moins, d'un risque de démolition.
Peu après la vente, le couple se décidait finalement à transformer leur bien, mais les travaux modificatifs projetés leur sont refusés au motif qu'ils étaient prévus « sur une construction qui ne respectait pas la distance réglementaire de 4 mètres de la limite séparative ».
La cour d'appel saisie avait rejeté toute condamnation de ce dernier. Elle avait en effet remarqué que l'absence d'autorisation d'urbanisme laissait bel et bien supposer que l'agrandissement en cause était illégal, ce dont les acquéreurs avaient d'autant mieux pu se convaincre que leur déclaration dans l'acte de vente établissait cette connaissance. Néanmoins, la première chambre civile de la Cour de cassation décide au final de donner raison à ces derniers, au motif qu'ils « n'avaient pas été informés des incidences de la non-conformité du bien au permis de construire et de l'impossibilité de procéder à des travaux nécessitant un tel permis ».
Les hauts magistrats fondent logiquement la responsabilité du notaire sur son devoir de conseil : au visa de l'article 1240 du Code civil (ancien article 1382), ils rappellent que le notaire, officier public « est tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique » .
- Cour de cassation, 1re Chambre civ.., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-14.752
Commentaire de cet arrêt : Revue Responsabilité civile et assurances n° 9, septembre 2021, chron. 1
Responsabilité professionnelle des notaires : chronique d'actualité (1re partie)
par Philippe Pierre professeur à l'université de Rennes 1 - directeur du DSN - membre de l'IODE (UMR CNRS 6262)