Mme Hamida S. et M. Raphael P. résident sur la commune de Deols (36) où ils sont propriétaires de deux ensembles immobiliers voisins.
Soutenant que le chien de chasse de M. P. venait fréquemment sur sa propriété pour tuer ses volailles, Mme S. a assigné son voisin devant le tribunal judiciaire de Guéret en réparation de ses préjudices sur les fondements juridiques du trouble anormal de voisinage et d'atteinte à son droit de propriété.
Par jugement du 21 mai 2021, le tribunal judiciaire a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, notamment condamné M. P. à payer à Mme S. une somme de 70 euros en réparation de son préjudice matériel sur le fondement de l'article 1243 du code civil, après avoir écarté l'existence d'un trouble anormal du voisinage.
Mme S. a relevé appel de ce jugement.
Les incursions, même fréquentes d'un chien, dans la propriété voisine ne constituent pas un trouble anormal de voisinage dès lors que les propriétés en cause sont situés dans un lieu s'apparentant à une zone rurale, que la victime des incursions litigieuses a fait édifier un poulailler et possède d'autres animaux (un bouc, des moutons, une chèvre) qui ont une source de nuisances sonores et olfactives et qui ne peuvent que susciter la convoitise du chien de chasse du propriétaire voisin. Par ailleurs, il appartient à chaque propriétaire de prendre toutes dispositions utiles pour empêcher leurs animaux respectifs de s'introduire sur le fonds du voisin. La cour rejette en conséquence les demandes indemnitaires de la propriétaire du poulailler fondées sur l'existence d'un trouble anormal de voisinage.
En revanche, il incombe au propriétaire du chien de réparer les dommages causés par son animal sur le fondement de l'article 1243 du Code civil. Compte tenu de la présence sur le secteur de nombreux prédateurs, le propriétaire du chien ne peut être tenu d'indemniser la propriétaire du poulailler de toutes ses pertes. La destruction de la clôture ne peut davantage être imputée de manière certaine au chien. En l'occurrence, la perte de 5 poules, d'une oie et d'un coq sont imputables au chien. La propriétaire est ainsi indemnisée à hauteur de 100 euros pour la perte de ses animaux (10 euros pour une poule pondeuse, 12 euros pour le coq et 30 euros pour l'oie). La perte de production des oeufs est évaluée à 50 euros. Elle a également subi un préjudice moral résultant des perturbations au quotidien, des plaintes et des demandes d'indemnisation engendrées par cette situation. En outre, la victime a été confrontée à la mort de ses animaux de compagnie. Ce préjudice moral est réparé à hauteur de 1000 euros. C'est donc la somme totale de 1150 euros qui est mise à la charge du propriétaire du chien à titre de dommages et intérêts.
- Cour d'appel de Limoges, Chambre civile, 13 Avril 2022, RG n° 21/00657