Le Conseil d'État s'est prononcé sur la légalité des textes fixant les conditions de constitution et de fonctionnement des sociétés pluri-professionnelles d'exercice.
L'art. 65 de la loi du 6 août 2015 a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour faciliter la création des sociétés pluri-professionnelles d'exercice « en prenant en considération les incompatibilités et les risques de conflits d'intérêts propres à chaque profession « et en « préservant les principes déontologiques applicables à chaque profession ». Ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de modifier ou de remettre en cause les règles déontologiques en vigueur propres à chacune des différentes professions susceptibles d'entrer dans l'objet social d'une société pluri-professionnelle d'exercice. Contrairement à ce que soutiennent le Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires et la chambre interdépartementale des notaires de Paris, elles n'imposent au Gouvernement ni de prévoir dans l'ordonnance des règles déontologiques spécifiques à l'exercice de différentes professions par la même société, ni de créer une autorité interprofessionnelle, ni même d'imposer au pouvoir réglementaire le soin d'édicter de telles règles. Il demeure loisible au pouvoir réglementaire d'adopter de telles dispositions s'il estime qu'elles sont de nature à renforcer l'efficacité du traitement des difficultés déontologiques et des conflits d'intérêts.
Il résulte des termes mêmes de l'art. 31-8 de la loi du 31 décembre 1990 issu de l'ordonnance attaquée que chaque professionnel doit respecter, dans son exercice professionnel au sein d'une société pluri-professionnelle d'exercice, les dispositions réglementaires encadrant l'exercice de sa profession, notamment celles relatives à la déontologie, à la prévention et à la gestion des conflits d'intérêts. L'obligation d'information mutuelle des associés et des salariés prévue à l'art. 31-8 est destinée à permettre à chaque professionnel d'assurer la gestion d'un conflit d'intérêts identifié au regard des prescriptions déontologiques propres à sa profession. Les dispositions en vigueur applicables en cas de méconnaissance des obligations professionnelles et déontologiques ont vocation à s'appliquer en cas de non-respect de cette obligation. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que, faute d'avoir précisé les règles déontologiques et celles relatives à la gestion des conflits d'intérêts au sein des sociétés pluriprofessionnelles d'exercice, l'art. 3 de l'ordonnance attaquée méconnaîtrait la loi d'habilitation et, en tout état de cause, le principe constitutionnel de continuité du service public de la justice.
- Conseil d'Etat, 17 juin 2019, req. 400192 et 412149